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    Le Chêne et le Roseau

    Le Chêne un jour dit au Roseau :
    « Vous avez bien sujet d’accuser la Nature ;
    Un Roitelet pour vous est un pesant fardeau.
    Le moindre vent, qui d’aventure
    Fait rider la face de l’eau,
    Vous oblige à baisser la tête :
    Cependant que mon front, au Caucase pareil,
    Non content d’arrêter les rayons du soleil,
    Brave l’effort de la tempête.
    Tout vous est Aquilon, tout me semble Zéphyr.
    Encor si vous naissiez à l’abri du feuillage
    Dont je couvre le voisinage,
    Vous n’auriez pas tant à souffrir :
    Je vous défendrais de l’orage ;
    Mais vous naissez le plus souvent
    Sur les humides bords des Royaumes du vent.

    La nature envers vous me semble bien injuste.
    - Votre compassion, lui répondit l’Arbuste,
    Part d’un bon naturel ; mais quittez ce souci.
    Les vents me sont moins qu’à vous redoutables.
    Je plie, et ne romps pas. Vous avez jusqu’ici
    Contre leurs coups épouvantables
    Résisté sans courber le dos ;
    Mais attendons la fin. « Comme il disait ces mots,
    Du bout de l’horizon accourt avec furie
    Le plus terrible des enfants
    Que le Nord eût portés jusque-là dans ses flancs.
    L’Arbre tient bon ; le Roseau plie.
    Le vent redouble ses efforts,
    Et fait si bien qu’il déracine
    Celui de qui la tête au Ciel était voisine
    Et dont les pieds touchaient à l’Empire des Morts.

    ibxkec

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    Le Renard et les Raisins

    Certain Renard Gascon, d’autres disent Normand,
    Mourant presque de faim, vit au haut d’une treille
    Des Raisins mûrs apparemment,
    Et couverts d’une peau vermeille.
    Le galand en eût fait volontiers un repas ;
    Mais comme il n’y pouvait atteindre :
    « Ils sont trop verts, dit-il, et bons pour des goujats.  »
    Fit-il pas mieux que de se plaindre ?

     

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    On s’installe le soir au frais sur la terrasse
    Pour mieux s’y reposer ; puis l’on cligne des yeux,
    Tout effaré de vivre un tel instant de grâce ;
    On sent son coeur qui bat ! Tant de beauté, mon Dieu…

    Les flèches des cyprès rayurent la colline
    De verticales bleues sur le feuillage vert.
    Au couchant le soleil qui s’éteint enlumine
    Le ciel pur qui palpite encore de lumière,

    Cette lumière rose éclaboussée d’orange
    Encerclant d’une aura chaque arbre et chaque fleur
    Et les toits au lointain. Une sorte de frange
    Qui auréole tout d’une étrange couleur !

    Au fond du val un arbre au beau feuillage rouge
    Met une tache feu sur la masse des pins.
    L’horizon est carmin et l’on dirait qu’il bouge
    Sous le soleil qui meurt d’une agonie sans fin.

    La colline s’endort. Peu à peu s’y allument
    Des lucioles dorées : les lampes des maisons
    Sous leur toit orangé. La corne de la lune,
    Croissant roux effilé, s’est mise au diapason

    ibxkec

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  • le-renard-et-la-cigogne.jpg

    Compère le Renard se mit un jour en frais,
    et retint à dîner commère la Cigogne.
    Le régal fût petit et sans beaucoup d'apprêts :
    Le galant pour toute besogne,
    Avait un brouet clair ; il vivait chichement.
    Ce brouet fut par lui servi sur une assiette :
    La Cigogne au long bec n'en put attraper miette ;
    Et le drôle eut lapé le tout en un moment.
    Pour se venger de cette tromperie,
    A quelque temps de là, la Cigogne le prie.
    "Volontiers, lui dit-il ; car avec mes amis
    Je ne fais point cérémonie. "
    A l'heure dite, il courut au logis
    De la Cigogne son hôtesse ;
    Loua très fort la politesse ;
    Trouva le dîner cuit à point :
    Bon appétit surtout ; Renards n'en manquent point.
    Il se réjouissait à l'odeur de la viande
    Mise en menus morceaux, et qu'il croyait friande.
    On servit, pour l'embarrasser,

    En un vase à long col et d'étroite embouchure.
    Le bec de la Cigogne y pouvait bien passer ;
    Mais le museau du sire était d'autre mesure.
    Il lui fallut à jeun retourner au logis,
    Honteux comme un Renard qu'une Poule aurait pris,
    Serrant la queue, et portant bas l'oreille.
    Trompeurs, c'est pour vous que j'écris :
    Attendez-vous à la pareille.

    rencig.jpg

     

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  • cueillette-lavande1

    La cueillette de la lavande

    Au flanc du mont Ventoux l’on cueillait la lavande
    Au mitan de juillet, quand elle était bien mûre,
    Quand son odeur sucrée ondoyait sur la lande
    Et que le grand beau temps était à peu près sûr.

    Dès le petit matin l’on partait tout farauds,
    Les grands pour quelques sous, les enfants pour jouer.
    On prenait beaucoup d’eau car il faisait très chaud,
    Un repas froid, des fruits cueillis dans le verger.

    Les femmes paraissaient toutes empaquetées
    Avec leur tablier relevé à la taille
    Pour former un grand sac. Les enfants qui riaient
    Se lançaient des olives en guise de mitraille.

    On cueillait, on cueillait, en formant de grands ronds
    Dans les champs bourdonnant de milliers d’abeilles.
    Les tabliers bouffis sentaient alors si bon
    Que l’on en supportait les excès du soleil.

    On revenait fourbu, se traînant jusqu’au mas
    Avec les bras chargés de millions de fleurs.
    On avait mal au dos, l’on se sentait très las
    Malgré les sacs gonflés d’une ineffable odeur.

     

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  • 38213

     

    Le loup et l'agneau

    La raison du plus fort est toujours la meilleure :
    Nous l'allons montrer tout à l'heure.


    Un agneau se désaltérait
    Dans le courant d'une onde pure.
    Un loup survient à jeun, qui cherchait aventure,
    Et que la faim en ces lieux attirait.
     « Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage ?
    Dit cet animal plein de rage :
    Tu seras châtié de ta témérité.
    - Sire, répond l'agneau, que votre Majesté
    Ne se mette pas en colère ;
    Mais plutôt qu'elle considère
    Que je me vas désaltérant
    Dans le courant,
    Plus de vingt pas au-dessous d'Elle,
    Et que par conséquent, en aucune façon,

    Je ne puis troubler sa boisson.
    - Tu la troubles, reprit cette bête cruelle,
    Et je sais que de moi tu médis l'an passé.
    - Comment l'aurais-je fait si je n'étais pas né ?
    Reprit l'agneau, je tette encor ma mère.
    - Si ce n'est toi, c'est donc ton frère.
    - Je n'en ai point. - C'est donc quelqu'un des tiens :
    Car vous ne m'épargnez guère,
    Vous, vos bergers, et vos chiens.
    On me l'a dit : il faut que je me venge.»
    Là-dessus, au fond des forêts
    Le loup l'emporte, et puis le mange,
    Sans autre forme de procès.

     

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  • pleine12.jpg

     

    Clair de lune

    Un rouleau, deux rouleaux sur la plage qui dort ;
    Deux rouleaux, trois rouleaux,  puis quatre frangés d’or
    Sous les rayons aigus de la lune placide.
    Il fait frisquet ce soir et la brise est acide.

    C’est un lent va-et-vient sur le sable en béton
    Que l’eau effrite à peine ; et quelques blancs moutons
    Moussent en pétillant sur la grève d’argent.
    C’est un lent va-et-vient, une valse à deux temps

    Rythmés par un reflux mystérieux et secret.
    Pas de marée ici, mais l’eau semble avancer
    Pour s’en aller lécher l’escalier de la plage.
    La lune toute ronde est semblable à l’image

    Qu’en dessinent toujours les tout petits enfants.
    Un flux et un reflux, une valse à deux temps
    Sous l’astre de la nuit immobile et placide
    Au-dessus de la mer ; le monde semble vide.

    ibxkec

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  • fbvfdbfb.jpg

     

    Le Lièvre et la Tortue

     

    Rien ne sert de courir ; il faut partir à point.
    Le Lièvre et la Tortue en sont un témoignage.
    Gageons, dit celle-ci, que vous n'atteindrez point
    Sitôt que moi ce but. - Sitôt ? Etes-vous sage ?
    Repartit l'animal léger.
    Ma commère, il vous faut purger
    Avec quatre grains d'ellébore.
    - Sage ou non, je parie encore.
    Ainsi fut fait : et de tous deux
    On mit près du but les enjeux :
    Savoir quoi, ce n'est pas l'affaire,
    Ni de quel juge l'on convint.
    Notre Lièvre n'avait que quatre pas à faire ;
    J'entends de ceux qu'il fait lorsque prêt d'être atteint
    Il s'éloigne des chiens, les renvoie aux Calendes,
    Et leur fait arpenter les landes.
    Ayant, dis-je, du temps de reste pour brouter,
    Pour dormir, et pour écouter
    D'où vient le vent, il laisse la Tortue
    Aller son train de Sénateur.
    Elle part, elle s'évertue ;
    Elle se hâte avec lenteur.
    Lui cependant méprise une telle victoire,
    Tient la gageure à peu de gloire,
    Croit qu'il y va de son honneur
    De partir tard. Il broute, il se repose,
    Il s'amuse à toute autre chose
    Qu'à la gageure. A la fin quand il vit
    Que l'autre touchait presque au bout de la carrière,
    Il partit comme un trait ; mais les élans qu'il fit
    Furent vains : la Tortue arriva la première.
    Eh bien ! lui cria-t-elle, avais-je pas raison ?
    De quoi vous sert votre vitesse ?
    Moi, l'emporter ! et que serait-ce
    Si vous portiez une maison ?

     

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    • Lessive.jpg

     

    La grande lessive

    Autrefois, deux fois l’an, c’était « la bugado » :
    Quel tintouin, mes amis, et quel remue-ménage !
    Dès l’aube du lundi tout d’abord le trempage
    Dans l’eau additionnée de soude en gros cristaux ;

    Un rinçage abondant ; et puis on préparait
    Le cuvier tapissé d’un drap ou d’un tissu ;
    On y mettait le linge, un autre drap dessus
    Où l’on plaçait les vieilles cendres du foyer ;

    Sur l’ensemble on versait alors de l’eau bouillante
    Qui coulait dans un seau placé sous un trépied ;
    Ca durait une nuit où tous se relayaient :
    De l’eau, encor de l’eau, dans des vapeurs ardentes…

    On empilait le linge en tas sur la brouette
    Pour aller le rincer plus loin à la rivière
    Ou au lavoir, selon… Et là les lavandières
    Frottaient encore un coup torchons et serviettes,

    Camisoles, jupons… Rinçages abondants,
    Encor un et puis deux… Ensuite l’essorage…
    L’étendage sur l’herbe … et la fin de l’ouvrage !
    En est-il pour encor vanter  « le bon vieux temps » ?

    jhfn4xys[1]

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  • le corbeau et le renard

     

    Maître Corbeau, sur un arbre perché,
    Tenait en son bec un fromage.
    Maître Renard, par l'odeur alléché,
    Lui tint à peu près ce langage :
    Et bonjour, Monsieur du Corbeau,
    Que vous êtes joli ! que vous me semblez beau !
    Sans mentir, si votre ramage
    Se rapporte à votre plumage,
    Vous êtes le Phénix des hôtes de ces bois.
    À ces mots le Corbeau ne se sent pas de joie,
    Et pour montrer sa belle voix,
    Il ouvre un large bec, laisse tomber sa proie.
    Le Renard s'en saisit, et dit : Mon bon Monsieur,
    Apprenez que tout flatteur
    Vit aux dépens de celui qui l'écoute.
    Cette leçon vaut bien un fromage sans doute.
    Le Corbeau honteux et confus
    Jura, mais un peu tard, qu'on ne l'y prendrait plus.

    jhfn4xys[1]

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